01 Avr Du Burn-out au Bore-out : quand les lois s’emmêlent
Les années 90 ont connu nombre de scandales basés sur des niveaux de risques psychosociaux élevés dans de très grands groupes. Ceci n’ont hélas pas totalement disparu. Au contraire même, les infographies issues des réponses au diagnostic en accès libre sur lediag.net mettent en évidence de nouveaux types de stress, induits parfois par les outils digitaux mal implémentés. Le burn-out n’est alors pas loin !
Le législateur a depuis strictement encadré la responsabilité de l’employeur en matière de risques psychosociaux. Tous les dirigeants se sont attelés à la rédaction puis les mises à jour régulières du fameux DUER. Le premier accord national interprofessionnel sur le stress au travail de Juillet 2008, a été complété en 2010 par celui sur le harcèlement et la violence ou travail puis la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle en 2013.
Nous voulons dans ce billet tirer la sonnette d’alarme sur un autre volet appelé à prendre de l’importance dans les années à venir et pointer les risques de la nouvelle loi en cours de préparation. Il s’agit des nouvelles opportunités ouvertes pour contrôler l’activité des salariés mais aussi de son opposé aberrant : le Bore-out
Déjà, les années 2000 avaient vu fleurir nombre de solutions permettant aux entreprises de détecter l’inactivité de leurs employés au travail : programmes espions surveillant les mouvements de la souris pour détecter les phases d’inactivité, ou même enregistrement en continu de l’écran des salariés. Parfois installées à l’insu des salariés concernés, ces expérimentations ont vite été déclarées hors la loi avec la mise en place de la RGPD.
Mais un contrôle plus strict encore de la productivité au travail pourrait rapidement devenir la norme grâce à la combinaison des neurosciences dopées à l’IA et des objets connectés à internet dont la miniaturisation progresse à grands pas, le fameux IoT.
Les solutions évoquées plus haut ne se basaient que sur les gestes effectués par le salarié sur les interfaces de son équipement informatique : clavier, souris…Les chercheurs des quelques startups lancées sur ces nouveaux chantiers nous promettent un avenir bien différent avec la prise en compte en temps réel du rythme cardiaque, du stress, des mouvements oculaires, des réactions faciales, voire carrément des ondes cérébrales…
Samsung, Apple, Swatch, Garmin, Fitbit… on ne compte plus les marques de montres connectées permettant de rester en contact avec sa tribu, suivre ses efforts physiques. Mais les chercheurs du MIT proposent déjà une montre capable d’écouter vos conversations, de les retranscrire, et d’analyser votre humeur !
Dopés à l’IA, les travaux sur l’analyse en temps réel d’un visage pour y détecter des émotions ont aussi fait de grands pas. Certaines startups promettent de mesurer la réaction d’un collaborateur à l’ouverture du mail envoyé par son hiérarchique ou lors de la lecture du prochain plan stratégique de l’entreprise. Oublié le détecteur de mensonge des vieux films américains : les dirigeants pourront savoir en temps réel si la base apprécie ou pas leurs messages ! Les nombreuses startups qui proposent des formulaires d’évaluation de l’engagement des salariés ont du souci à se faire car il ne sera même plus nécessaire de leur poser des questions en ligne. Un coup d’oeil sur le site weawe.eu vous donne un avant goût de ce que le deep learning peut amener dans « l‘informatique affective ».
Heureusement, les responsables au plus haut niveau de l’Etat et la Commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale ont pris conscience de ces nouveaux risques. Une partie des députés travaillent à la préparation de ces textes qui permettront de réguler le contrôle de l’activité des salariés et assurer une répartition la plus équitable possible de la charge de travail. Du côté de l’exécutif, le cabinet de Mounir MAHJOUBI semblait très sensible à ce projet. Mais son départ afin de se lancer dans la campagne des élections pour la Mairie de Paris risque de retarder les travaux.
Ces textes s’annoncent d’autant plus difficiles à rédiger qu’ils doivent indiquer des limites objectives aussi bien pour les seuils hauts que bas ! En ce qui concerne les seuils hauts, la capacité de concentration ou celle à absorber une charge de travail physique n’est pas la même pour chaque individu. Pour les seuils bas, le problème semble plus délicat encore. Le mouvement des gilets jaunes a mis en lumière le cas de Jean-François BARNABA, fonctionnaire territorial, qui touche 2.600 euros net par mois sans travailler. Qu’il s’agisse de personnes ayant un emploi mais sans tâche de travail attribuée ou de fonctionnaires sans aucun emploi le défi semble bien réel.
Merci d’avoir lu ce billet jusqu’au bout. Avez vous noté qu’il a été émis un 1er Avril ? Beaucoup d’éléments sont de véritables informations dans les lignes ci-dessus. Sauf les travaux sur la nouvelle loi. Elle serait pourtant bien nécessaire, non ?
Aucun commentaire