10 Mai IA lire et écrire
Bill GATES vient de lancer un nouveau pavé dans la mare, en rapprochant les termes IA et apprentissage. Mais avant de commenter ses propos, je me suis demandé quel était l’équilibre entre ces deux notions. Après tout, si l’IA risque de remplacer certains de nos métiers, d’autres solutions informatiques peuvent aussi nous aider à apprendre plus vite et mieux. J’ai donc demandé à Google de me donner quelques indications sur cet équilibre. Sans remonter jusqu’au sigle EAO, quasi invisible dans Google Trends, voici la courbe comparant les nombres de recherches entre les mots clés « elearning » et « IA ».
Alors que l’on pourrait penser que la mode IA est plutôt récente, depuis 2004 la courbe rouge concernant le mot « IA » l’emporte largement sur la courbe bleue suivant le terme « elearning ». Mais, depuis 2020 on note un réel sursaut de recherche autour de l’elearning.
Chose surprenante, puisque Google permet de regarder les différences entre les pays, tous ne sont pas logés à la même enseigne, avec de forts écarts, y compris entre les pays européens. Ainsi parmi les pays cherchant le plus souvent le terme elearning, la Thaïlande arrive en tête mais la Grèce et le Portugal ne sont pas loin derrière. La France, cependant, fait partie des pays dans lesquels ce terme est peu recherché, avec une très forte prédominance du terme « IA ».
Apprendre à lire
Dans un de ses derniers interviews, Bill GATES explique qu’il est convaincu que l’IA va pouvoir apprendre à nos chères petites têtes blondes à lire et à écrire (voir articles sur digmactu.com ou jeuxvideo.com ). Il est courant de considérer qu’un homme de son expérience est assez visionnaire mais là je dois reconnaître que je reste dubitatif. Et pourquoi pas apprendre à parler pendant que l’on y est !
Comme moi vous vous rappelez sans doute l’apprentissage de la lecture, basé pendant des décennies sur la méthode Boscher. On annone quelques temps et puis hop, sans que l’on se rende vraiment compte de la bascule, on devient capable de lire des livres en entier. Du mal à voir ce que l’IA va pouvoir amener dans cette phase. D’autant plus que d’autres études montrent que la lecture sur écran semble plus difficile que sur papier, l’œil ne visitant pas le texte de la même façon. Je suis d’ailleurs étonné qu’aucune startup n’ait pensé à sortir une liseuse capable d’analyser le regard du lecteur et faire défiler automatiquement le texte en fonction des mouvements oculaires. Avec un peu d’entraînement cela permettrait des vitesses de lecture plus élevées encore que sur un support papier.
Une autre réflexion personnelle sur cette problématique de la lecture : compte tenu de la multiplication des outils de text-to-speech, pourra-t-on demain vivre sans savoir lire ? et simplement se faire lire ces textes ?
Et l’écriture ?
Bill GATES voit aussi l’IA marquer des points dans l’apprentissage de l’écriture. Petit détail, il n’est pas précisé s’il s’agit d’une écriture manuscrite ou de saisie sur un clavier. Ceux qui sont de ma génération se rappellent sans doute les fameuses plumes sergent major et les encriers qu’il fallait remplir régulièrement. Apprendre à dessiner chaque lettre et faire des plein et des déliés…Là encore je me demande s’il cela va rester utile de savoir écrire avec un stylo sans utiliser de clavier. La charge mentale consistant à appuyer deux fois de suite sur les touches P puis A est tellement plus faible que celle consistant à commencer à monter, descendre pour marquer la jambe du « p« , revenir faire une jolie boucle pour dessiner le « a« …
Comme pour la lecture on peut aussi se demander si écrire va rester vraiment nécessaire. Après tout, les objets connectés capables de comprendre nos ordres oraux se multiplient, non ? Pour le fondateur de Microsoft, l’IA devrait surtout nous apprendre à écrire des textes de qualité. Mais comme déjà les simples correcteurs orthographiques sont souvent pas ou mal utilisés…
Je reste donc très sceptique sur les progrès que pourrait amener l’IA dans ces actes d’écriture et de lecture, qui sont avant tout là pour que des êtres humains puissent communiquer entre eux, en asynchrone. Cet aspect asynchrone peut d’ailleurs s’étendre sur des générations, voire des millénaires comme nous le rappelle la Pierre de Rosette ou les peintures rupestres de la grotte de Lascaux.
Terminons sur une remarque un peu paradoxale. Un nouveau métier est en train d’apparaître : celui d’ingénieur prompt. Il est chargé d’écrire des requêtes qui vont pouvoir être interprétées efficacement non plus par un être humain, mais par un système comme ChatGPT ou un de ses concurrents ! Est-ce que l’IA va aussi permettre de former plus vite les personnes souhaitant apprendre à « prompter » ?
A mon sens, les vraies ruptures en termes d’IA et d’apprentissage viendront plutôt des interfaces directes entre un cerveau et un système informatique. Et là il faut plutôt regarder du côté de NeuraLink ou de Precision Neuroscience…
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