Où sont passés les missiles ?

Où sont passés les missiles ?

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Amusante ou inquiétante, la dernière « surprise » du web ? Résumons : les soldats américains en charge du feu nucléaire ont tellement d’informations secrètes à retenir par cœur qu’ils ont pris l’habitude d’utiliser des applications en ligne pour faciliter la révision des examens destinés à vérifier qu’ils avaient bien retenu leurs leçons. Le souci, comme le dévoile cet article du journal Le Monde, est que certaines de leurs fiches de révision se sont retrouvées en accès libre, accessibles via une simple recherche Google. Merci à Bellingcat d’avoir identifié cette dérive (billet en anglais).

Diable ! Il faut bien que ces applications de révision attirent de futurs utilisateurs et pour cela il faut montrer ses muscles à Google et permettre l’accès à plein d’informations intéressantes qui peuvent aussi s’avérer sensibles. Tous les étudiants le savent, ces applications sont intéressantes si vous pouvez très rapidement y retrouver les fiches de révision dont vous avez besoin au lieu de devoir rédiger les vôtres.

Je vous vois déjà, cher lecteur, froncer les sourcils et vous demander pourquoi j’aborde ce sujet anecdotique, qui n’a évidemment rien à voir avec votre environnement de travail. Je pense tout au contraire que cet anecdote peut amener à se poser quelques questions sur les liens entre management et digital dans l’ensemble des organisations y compris la votre.

Management et connaissances

Que peut exiger un manager en terme de maîtrise de l’information de la part de ses collaborateurs. En l’occurrence, est ce vraiment important qu’un soldat de base sache par cœur que sur la base aérienne de Volkel, en Hollande, il y a 11 missiles américains stockés dont 5 seulement sont armés et prêts à l’emploi ? Ou bien serait-il plus logique d’avoir un système d’information donnant accès, après identification, à ces mêmes informations toujours à jour ?

Je ne sais pas comment cela se passe dans l’armée française mais cela me fait penser à un des sketches de Fernand Raynaud. Les soldats n’arrivent pas à répondre à la fameuse question « combien de temps met le fut du canon pour se refroidir ». Si vous avez besoin de rire un peu, prenez 3′ pour écouter la réponse : le fut du canon sur youtube .

Du coup, je me suis posé la question sur mes propres activités. Est-ce que dans les différentes structures que je dirige j’exige aussi de mes troupes l’apprentissage par cœur de plein de sigles, chiffres et acronymes ? Je ne le pense pas. Bien entendu pour travailler chez DIAG26000 il faut avoir un mimum de connaissance de la RSE et savoir que la norme ISO26000 existe. Mais pas besoin de connaître sur le bout des doigts les 47 domaines d’action de la norme. Idem pour LeDIAG : il faut être passionné par le management et/ou le digital. Mais je ne vois pas ce qu’il est nécessaire de connaître par cœur, à part les 5 dimensions clés de l’outil, si faciles à retenir. Par contre tout est prévu pour capter des informations externes, partager avec toute l’équipe les informations des contacts, qu’ils soient déjà clients ou simplement prospects.

Finalement cette fuite involontaire d’informations confidentielles me fait un peu penser à du knowledge management à l’envers. Au lieu de partager les informations intéressantes que chaque collaborateur détient on impose un apprentissage qui pourrait sans doute être remplacé par une mise à disposition de la bonne information au bon moment.

Il y a de l’IA partout ? Vraiment ?

Ce qui prête à sourire aussi dans cette histoire, c’est le décalage flagrant entre la modernité affichée par la première puissance mondiale pour faire la guerre à distance, développer des robots tueurs et les applications de l’Intelligence Artificielle dans la gestion des conflits. Comme nous en sommes loin ici avec les troufions obligés d’apprendre par cœur le nom des hangars où sont stockées les armes !

Bring Your Own Devices

Sur ce dernier point on retrouve une faille classique. Vous risquez d’y être confronté, quelle que soit le domaine d’activité de votre entité. Chaque collaborateur peut décider d’utiliser son matériel personnel (parfois plus puissant que celui mis à disposition par l’entreprise !) ou par extension les applications externes qu’il juge utile pour mieux s’organiser.

Il est probable qu’aucun des colonels responsables de cet arsenal nucléaire n’avaient imaginé que les soldats utiliseraient Chegg, Quizlet ou Cram pour y enregistrer leurs fiches de révision. Ce fut certainement un choix personnel de la part des soldats de se faire assister par ces applications non fournies par l’US Army.

Lorsque le télétravail diminuera et que les discussions pourront reprendre autour de la machine à café, prenez le temps de demander à vos collaborateurs quels outils ils utilisent en plus de ceux mis officiellement à disposition par votre organisation. Et préparez vous à quelques surprises !

Une solution pour contrer ce genre d’effets pervers et éviter de vous retrouver cité avec une pointe d’ironie dans un des prochains articles du journal Le Monde : prenez le temps de lancer une démarche participative sur le management du digital dans votre structure.

C’est en écoutant les véritables besoins de chaque catégorie d’utilisateurs que vous pourrez éviter ces pièges.

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