19 Juin Notre interview d’Emmanuelle Antoine Vallée
Bonjour Emmanuelle, pouvez-vous nous retracer les grandes étapes de votre parcours ?
J’ai évolué pendant plus de vingt ans dans le secteur pharmaceutique, à l’organisation d’événements internes et externes, souvent à l’international. En tant qu’organisatrice, j’ai pu développer mes capacités d’adaptabilité, de rigueur et de coordination. Je travaillais en étroite collaboration avec les équipes en interne, prestataires et clients en créant du lien. Les années passant, j’ai senti que je voulais aller plus loin, que j’aspirais à autre chose.
J’ai d’abord commencé à regarder du côté des fondations d’entreprise mais je me suis rendu compte qu’il était difficile d’y entrer : très peu d’offres sont publiées car la mobilité interne est souvent privilégiée.
Un jour, j’ai vu passer une annonce d’emploi pour un poste de Chief Happiness Officer et cette découverte a été déterminante. Le contenu du poste était exactement ce qui faisait sens pour moi, ce en quoi j’avais envie de m’investir. J’ai fait jouer mon réseau et ai pu rencontrer une personne qui exerçait cette fonction. Elle a pu m’orienter et me conforter dans le fait que cette fonction correspondait à mes attentes d’évolution professionnelle.
Depuis, je me suis formée auprès de la Fabrique Spinoza (think tank du bonheur) et Laurence Vanhée (auteur de Happy RH). Je participe régulièrement à des ateliers, conférences, webinars et salons en lien avec la Qualité de Vie au Travail (QVT). J’ai également suivi une formation aux Ressources Humaines pour compléter mon cursus. Aujourd’hui, je me suis rendu compte que les offres de ce type de poste ne sont pas « visibles » et donc je sollicite mon réseau pour dénicher ces nouveaux postes et en même temps je démarche les entreprises qui me semblent avoir de l’ambition en matière de QVT.
Qu’est ce qui vous attire dans le métier de Chief Happiness Officer ?
Le fait que ce métier soit porté sur l’Humain. J’ai envie de contribuer à créer un climat bienveillant et favorable au bien être des collaborateurs. Beaucoup font aujourd’hui le constat que les entreprises ont besoin d’évoluer. En effet, les millennials aspirent à un management différent, moins contrôlant et à avoir davantage d’autonomie et de flexibilité. Sans tomber dans une injonction au bonheur, on constate partout que des stratégies en matière de QVT permettent aux salariés d’être plus épanouis. Une étude Harvard-MIT révélait encore récemment qu’un salarié heureux est deux fois moins malade, six fois moins absent, neuf fois plus loyal, 31% plus productif et 55% plus créatif qu’un salarié insatisfait.
Comment percevez-vous le phénomène « babyfoot » que l’on associe souvent aux Chief Happiness Officer ?
Happycratie et La Comédie Inhumaine sont deux ouvrages qui ont dénoncé cet état de fait. Certaines entreprises ont recruté des Chief Happiness Officer (CHO) parfois des stagiaires sans leur donner de réels moyens pour agir. Le babyfoot n’était donc qu’un simple vernis pour masquer un manque de volonté sincère et pérenne de mettre en place cette politique de QVT. On a même vu des CHO faire des burn-out dans ces entreprises, ce qui parait complètement insensé.
Le Chief Happiness Officer commence par établir un état des lieux de ce qui va et de ce qui est à améliorer afin de voir ce qui peut être mis en place. La subtilité étant que les solutions ne sont pas forcément transposables d’une entreprise à l’autre, chaque cas est particulier. Etre à l’écoute et pratiquer la politique des petits pas permet d’avancer au mieux dans la bonne direction. Les objectifs également doivent être clairs : créer un climat de bienveillance, de reconnaissance, de confiance, agir sur le cadre de travail, faciliter la coopération et les liens entre les individus… Etre en lien est un besoin absolument fondamental de l’être humain pour se sentir bien et être performant : l’entreprise a tout à y gagner.
Comment percevez-vous les différentes spécialisations qui entourent le métier du CHO aujourd’hui (responsable marque employeur, responsable expérience collaborateur, etc.) ?
A mon sens, tout se regroupe. Si un Chief Happiness Officer a la confiance de la Direction, il peut travailler sur l’ensemble de ces aspects. Dès lors qu’il y a la volonté de mettre en place un changement profond et global, il n’y a pas de raison d’agir seulement sur certains domaines.
En France, il y a aujourd’hui à peu près 150 Chief Happiness Officer. Certains salariés exercent un poste de CHO même si l’intitulé de leur poste est autre. Un Club des CHO s’est d’ailleurs créé et permet à ses membres de se rencontrer et de faire avancer les réflexions sur ce domaine où chacun est encouragé à partager ses idées.
Et en fait, le métier de CHO, il vient d’où ?
Le métier a été créé par Chade-Meng Tan, une recrue de Google à l’époque. Il voulait créer du lien dans l’entreprise et se faisant, il a créé la fonction. Une de ses premières actions a été de mettre en place des ateliers de méditation de pleine conscience et de développer l’intelligence émotionnelle au sein de Google. Puis il a fondé le Leadership Institute Search Inside Yourself dont les programmes proposent des outils pour instaurer un leadership bienveillant grâce notamment aux outils d’intelligence émotionnelle. J’ai pu assister à ce programme très formateur. Le constat est que beaucoup de personnes sont en perte de sens dans leur travail et personne n’en ressort gagnant ni le salarié, ni l’entreprise. En France par exemple, la plupart des CHO évoluent dans des grandes structures ou dans les start-ups. Or, il y a énormément d’entreprises plus traditionnelles qui connaissent peu ou pas ces nouvelles approches et qui auraient pourtant tant à y gagner. Les entreprises qui souhaitent mettre en place une démarche QVT peuvent me contacter sur Linkedin.
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